Le Bartang


Un massif montagneux sous-estimé, mais un massif des superlatifs : le Pamir.

Le Bartang se trouve en plein milieu du Pamir, un massif montagneux situé au cœur de l'Asie centrale et qui s'étend sur des parties du Tadjikistan, de l'Afghanistan et de la Chine de l'Ouest. Alors que, ces dernières années, l'Hindou-Kouch tout proche a fait quelques gros titres négatifs et que l'Himalaya menace à divers endroits d'étouffer sous la pression du tourisme de masse, un petit nombre de gens seulement connaît intimement cette pépite. A tort, car la géographie du Pamir offre de nombreux superlatifs : la montagne la plus haute de l'ex-Union soviétique, le glacier le plus long du monde en-dehors des régions polaires, et le lac de barrage possédant la digue naturelle la plus massive. Pour de nombreuses espèces animales menacées, comme le mouton géant de Marco-Polo (célèbre pour ses cornes d'une envergure allant jusqu'à 1,40 m.) ou le léopard des neiges, le Pamir offre un ultime espace-refuge. Les géologues connaissent le Pamir comme ayant été la seule source au monde pour le lapis-lazuli comme pour les spinelles énormes qui ont été enchâssées dans la couronne britannique. Pour les amateurs d'histoire, le Pamir est synonyme du Grand Jeu, ce conflit colonial qui s'est déroulé au 19e siècle entre l'empire britannique et la Russie tsariste pour la conquête des dernières parties blanches de la carte de l'Asie. Enfin, les ethnologues et les linguistes apprécient le Pamir pour sa grande diversité ethnique et culturelle: presque chaque vallée parle une langue ou un dialecte bien à elle, de sorte que les habitants de vallées voisines ne peuvent souvent pas se comprendre entre eux, et que de nombreuses traditions très anciennes ne sont pratiquées que dans un seul village.

"Celui qui n'a pas été au Bartang n'a pas vu le Pamir",

...a écrit autrefois le voyageur-chercheur russe Pavel Louknizki, qui est tombé amoureux du Bartang dans les années 30. Le Bartang ne jouit pas seulement auprès des étrangers, mais aussi auprès des Pamiris de la réputation d'être le cœur du Pamir, le lieu où le paysage est le plus dramatique, où le chemin est le plus dangereux, où la tradition est la plus authentique et l'hospitalité la plus sincère.

 

Comme la plupart des habitants du Pamir occidental, les habitants du Bartang parlent des dialectes appartenant à la famille des langues indo-européennes non écrites du Pamir. Sur le plan religieux, ils suivent les préceptes de l'ismaélisme Nizarite, une confession de l'islam chiite. Les Nizarites considèrent l'Aga Khan IV comme le plus proche descendant encore vivant du prophète Mahomet et comme la réincarnation de la lumière divine. Ses préceptes sont absolument aveuglants.

 

L'Aga Khan propage un islam admettant le progrès et tourné vers l'Occident, que même ses disciples du Bartang vivent d'une manière active, tout en le mêlant à de nombreuses pratiques spécifiques à l'endroit où ils vivent

Même à Roshorv, à 3.200 mètres d'altitude au Bartang, on récolte du blé (Photo Stefanie Kicherer)
Même à Roshorv, à 3.200 mètres d'altitude au Bartang, on récolte du blé (Photo Stefanie Kicherer)

La formation scolaire possède une valeur élevée, particulièrement aux yeux des filles: depuis que l'Aga Khan a promulgué une loi stipulant qu'une famille ayant plusieurs enfants doit penser avant tout à la formation des filles, presque 100% des écolières des classes de fin de scolarité essaient de décrocher une place dans le cycle supérieur.

 

Mais même avant, les Bartangis ont toujours été avides de culture: avant de venir au Pamir, refaites un tour dans vos livres de philosophie, car vous rencontrerez de nombreux hommes âgés portant une barbe en broussaille et un bonnet traditionnel, qui voudront vous entraîner dans des débats dialectiques sur Hegel, Rumi et autres grands penseurs de l'ouest et de l'est...

 

Tous les Bartangis sont cultivateurs pour leur subsistance et aussi éleveurs de bétail, beaucoup d'entre eux sont en même temps actifs au service de l'Etat (par exemple comme enseignants) ou travaillent comme chauffeurs. Comme leurs revenus suffisent rarement pour couvrir les besoins , souvent quelques membres de la famille partent se louer en Russie comme travailleurs immigrés et envoient de l'argent au village. Toutefois, les jeunes qui ressentent le désir de vivre longtemps à l'étranger sont peu nombreux: c'est au Bartang que la nature est la plus propre, que l'eau est la plus pure, c'est là que se trouvent les lieux saints qui dispensent leurs bénédictions à la communauté et que vivent les proches aimés, sans lesquels le Bartangi se sent comme un poisson sorti de l'eau. On entend souvent dire: "La vie au Bartang, ce serait vraiment comme le Paradis si seulement notre problème d'électricité pouvait être résolu."

 

--> Vous trouverez d'autres informations sur le Bartang dans la galerie de photos correspondante.